mardi 18 janvier 2011

Grégoire Corthay: journaliste professionnel à 20 Minutes

Aujourd'hui je compte parler de Grégoire Corthay. Si vous ignorez de qui il s'agit, c'est normal. Moi-même je ne le connais pas personnellement et ne l'ai jamais rencontré. En fait, j'ignorais jusqu'à son existence avant ces derniers jours. C'est que, voyez-vous, Grégoire Corthay n'est pas exactement l'auteur d'une oeuvre inoubliable, ni même quelqu'un qui aurait vaguement contribué à quoi que ce soit de marginalement important ou intéressant qui l'aurait rendu célèbre, dans n'importe quel domaine que ce soit. Du moins, pas à ma connaissance. Je ne dis pas ça pour être désagréable, hein, que ce soit bien clair, et je pense que la suite de mon billet rendra parfaitement clair le fait que je n'ai rien contre Grégoire Corthay, au contraire. Bon, mais pourquoi, dans le fond, parler de ce monsieur? Eh bien, parce qu'il est l'auteur de ça:


Ce charmant article, au titre si évocateur, a été publié dans le journal gratuit 20 Minutes du 17 janvier 2011 (et déjà le vendredi 14 janvier dans la version online). Grégoire Corthay, vous l'apprenez sans doute à l'instant, est donc journaliste et travaille pour le journal gratuit 20 Minutes. C'est un article très intéressant qu'il a écrit, à tel point que j'ai jugé vraiment important de produire l'abominable tartine qui suit, comme qui dirait pour la postérité, histoire que cet épisode particulier reste un peu consigné quelque part dans la jungle amnésique des faits d'actualités.
Toutefois, avant d'aller plus loin j'ai aussi jugé utile d'en dire un peu plus sur Grégoire Corthay et son oeuvre journalistique. C'est en effet important pour bien comprendre le sens de l'article en question, sans quoi je pourrais courir le risque de donner de Grégoire Corthay l'image d'un journaliste amateur, ou même celle d'un vulgaire pisse-copie parfaitement irresponsable et opportuniste qui serait comme une honte pour la profession à laquelle il prétendrait appartenir, et dont on pourrait se demander comment il parvient à avoir un estomac assez solide pour continuer à se regarder dans la glace chaque matin. Ce serait évidemment injuste, et c'est pour ça qu'il est si important d'établir avant toute chose le sérieux, l'expérience et le professionnalisme de Grégoire Corthay.

On peut considérer sans le moindre doute que son principal coup d'éclat, son "Watergate" personnel, consiste en la révélation tonitruante du salaire scandaleux de la présentatrice télé française Laurence Ferrari. Grégoire Corthay fut en effet le premier à recopier cette information hasardeuse sur le blog d'un journaliste français, tout en ayant eu la présence d'esprit de convertir les valeurs euros en francs suisses et de passer un coup de fil à Darius Rochebin pour lui faire dire que chez nous, ah ben ça se passe pas pareil. Cette incroyable présence d'esprit, par ailleurs, explique la théorie a priori intrigante de Grégoire Corthay selon laquelle ceux qui voudraient approfondir l'excellente information que l'on trouve dans les journaux gratuits devraient "aller sur internet" (par opposition, par exemple, à se renseigner grâce à la presse payante). Comme l'essentiel de ses incroyables scoops provient précisément de l'internet, on voit bien qu'il n'y a rien d'étonnant ou de ridicule dans cette suggestion, et surtout on comprend mieux, vraiment mieux, en quoi exactement internet est "un merveilleux outil" pour Grégoire Corthay.
Muni de cet oeil de lynx qui caractérise les plus grands journalistes de terrain, ainsi que n'importe quel débile disposant d'une connexion internet et une dizaine de neurones, Grégoire Corthay est donc habilité à transmettre de l'information aux masses populaires. C'est ainsi qu'il peut multiplier les domaines d'expertise et éblouir ses lecteurs d'innombrables joyaux journalistiques. Par exemple, Grégoire Corthay s'avère être un remarquable chroniqueur musical, et, au passage, n'hésite pas à déranger avec des interviews très inspirées de stars internationales. A ce titre, on aurait tort de ne pas signaler ses fines analyses dans le domaine de l'économie. En effet, ce n'est pas parce que Grégoire Corthay travaille pour un journal gratuit qu'il va se tenir coi sur les excès et les dangers du tout-publicitaire et ne pas se permettre, de temps en temps, un portrait ironique et ravageur de ses plus abjects représentants, aussi "sémillants" et "septuagénaires" soient-ils. De même, si les gros pollueurs de notre planète décident de s'engager écologiquement, on peut compter sur Grégoire Corthay pour mettre en avant, dans un vibrant plaidoyer, la touchante sincérité de ces entreprises que l'on considère encore trop souvent, et injustement, comme inhumaines. Car en réalité, ce qui compte avant tout pour un journaliste professionnel, et donc pour Grégoire Corthay, c'est d'être proche des gens. Après tout, les lecteurs, comme les électeurs, ne sont pas des imbéciles. D'ailleurs, si c'était le cas, liraient-ils la presse gratuite et voteraient-ils en masse pour un parti d'argentiers zürichois, les gens? Evidemment non. Proche des gens, donc, je vous dis. Et sous prétexte de faire partie de l'intelligentsia romande et d'être un journaliste "confirmé" qui ne jure que par les "faits", faudrait-il se garder de partager ses "bons plans" avec le grand public, ou taire l'actualité fascinante du FC Puplinge? Bien sûr que non, on peut être professionnel, sérieux et confirmé, ça ne fait pas pour autant de vous un cynique qui ne jure que par "l'élitisme" ou "l'intelligence". Après tout, l'information doit également faire sourire, les pendulaires n'ont pas toujours envie de se prendre la tête sur des sujets lourds et fâcheux. Et quel meilleur remède contre la morosité qu'une bonne élection de Miss Suisse portugaise, hein?
Non vraiment, moi je dis merci à Grégoire Corthay, et merci à tous les Grégoire Corthay de la Terre. Ce sont eux qui, malgré leur modestie et leur absolue insignifiance, contribuent à rendre le monde un petit peu plus facile à supporter. Oui, les petits comme Grégoire Corthay, ces minuscules plumes de rien du tout dont les textes sont lus et oubliés en une dizaine de secondes, ces microscopiques tâcherons de la copie, invisibles dans le grand jeu de l'actualité, ignorés et méprisés par les grands groupes dont ils ne sont que les esclaves soumis et remplaçables à merci, eh bien ce sont eux qui, jour après jour (après jour après jour), remplissent nos endurcies cervelles de cette délectable soupe allégée qui réchauffe nos sentiments, tout comme un simple western permettait à Ludwig Wittgenstein d'oublier l'espace d'un instant ses préoccupations sur l'ontologie et la grammaire.

Bien, je crois que ce bref survol professionnel permet de lever toute incertitude sur la rigueur, la sincérité et la modestie de Grégoire Corthay. Je peux donc maintenant me tourner sur l'article dont il était question avant que le paragraphe ci-dessus ne vous plonge en hibernation. De quoi s'agissait-il? C'est très simple, je reprends l'affaire à zéro histoire que tout le monde comprenne.
Vigousse, voyez-vous, envoie chaque jeudi à la presse (gratuite ou pas) un exemplaire de son numéro à paraître le lendemain. Ainsi, éventuellement, les autres journaux et radios peuvent l'utiliser pour leurs revues de presse, et le cas échéant y reprendre des informations (ou les voler sans les citer, c'est selon). Au 20 Minutes, apparemment, c'est Grégoire Corthay qui s'y colle. Une distraction sans doute, pour un journaliste confirmé comme lui qui doit sans cesse scruter l'internet pour y trouver des informations croustillantes à recopier. Toujours est-il que Grégoire Corthay n'est pas un simple petit soldat qui se contenterait de recracher servilement les pathétiques trouvailles d'un simple journal satirique. Non, lui, il va au fond des choses, et se fait une spécialité de débusquer ce qui pourrait vraiment intéresser ses lecteurs (qui ne sont pas, faut-il le rappeler, des imbéciles). Ainsi, il y a quelques semaines, Grégoire Corthay avait déjà révélé le "Freysingergate", une affaire retentissante qui tournait autour d'un dessin bien "scandaleux" (dans le sens où il était vaguement possible d'en faire un scandale si vraiment il le fallait, par exemple dans le cas où il n'y avait aucune information à recopier sur le blog d'un journaliste français ce jour là). Vendredi passé, du coup, ayant eu Vigousse en primeur, et étant bien déterminé à fournir des informations très importantes et instructives à ses lecteurs (qui ne sont toujours pas des imbéciles), Grégoire Corthay a déniché une fiche bricolage totalement absurde qu'il a jugée utilisable pour remplir un espace sans publicité dans le journal gratuit pour lequel il travaille. Joie! Un sujet! Dès lors, Grégoire Corthay, tel un super-héros, s'est mué en machine à enquêter et a décroché son téléphone. Au bout du fil, la CICAD, une association dont le but est, entre autres, de débusquer et comptabiliser ce qu'ils appellent des "actes antisémites".

Bon, à ce stade du récit, un individu à l'esprit tordu, qui ignorerait tout des subtilités du journalisme moderne et du professionnalisme de Grégoire Corthay, ainsi que du sérieux de la CICAD, pourrait se laisser aller à imaginer la conversation suivante. Je vous préviens, c'est totalement absurde, mais le but est de montrer jusqu'à quelles extrémités l'imagination de certains esprits chagrins peut aller.

Grégoire Corthay: "Bonjour, c'est Grégoire Corthay du 20 Minutes... oui c'est ça, effectivement, on se connaît déjà un peu... [voir plus bas] Bon alors voila, j'ai trouvé dans Vigousse une fiche bricolage à laquelle je ne comprends rien, mais il y a les mots "kippa" et "sang" dedans, et j'ai pensé que ça pourrait éventuellement vous intéresser et qu'ensemble on pourrait peut-être essayer de monter de toute pièce une sorte de scandale insignifiant."

Ce à quoi le correspondant de la CICAD, ainsi que pourrait l'imaginer notre individu plein d'aigreur, répondrait: "Oui parfaitement, ça tombe bien d'ailleurs, il y a longtemps que nous n'avons pas monté de toute pièce une sorte de scandale insignifiant nous non plus. Eh bien sachez que je suis parfaitement scandalisé par cette fiche bricolage qui n'a absolument aucun sens, et à ce titre, comprenez bien que tous les juifs du monde entier sont scandalisés également. Voila, C'est bon comme ça?".

Grégoire Corthay, à son tour: "Oui oui, parfait. Ou plutôt non, je voudrais encore savoir quand aura lieu le procès de cette affaire retentissante et combien d'avocats vous comptez mettre sur le coup."

La CICAD: "Que voulez-vous dire par "combien d'avocats"? Mmmh, faites attention quand même hein, je crois que nous allons garder un oeil sur vous... Bon, un procès vous dites? Heu, en fait, heu... je ne suis pas tellement sûr vous voyez... enfin, c'est-à-dire que malgré le scandale absolu que vous venez de me dévoiler, cette ignoble et incompréhensible fiche bricolage, hein, eh ben heu ce n'est pas vraiment un scandale pour de vrai, non? enfin c'est pas le type de scandale qui pourrait compter comme un scandale dans la vie réelle, quoi... Donc non, pas de procès. En revanche, je le garde pour notre rapport 2011 qui montrera l'augmentation des actes antisémites par rapport à notre rapport 2010, j'ai d'ailleurs déjà fait un joli graphique là dessus et je..."

Grégoire Corthay: "Oui oui, très bien. Bon ok, j'ai tout ce qu'il me faut pour remplir mon espace vide du journal gratuit pour lequel je travaille, merci et à bientôt".

Comme il est absolument impossible qu'une conversation aussi absurde ait vraiment eu lieu, il nous reste à comprendre pas mal de choses sur l'origine et la nature du contenu de cet article. C'est ce que je vais tenter de faire dans ce qui suit.
Vendredi 14 janvier 2011, à 13h50, l'article intitulé "Cette kippa en peau humaine est un scandale!" est donc mis en ligne. Le titre, avec guillemets et point d'exclamation, sonne assez bien. En tout cas, c'est sûr, il fonctionne mieux que la version provisoire, qui était: "Attendez, je ne comprends rien à cette histoire complètement absurde de "capet/kippa (calotte) réversible en cuir de copte pour l'hiver"... ça veut dire quoi exactement?". Bref, l'article ainsi jeté dans la jungle d'internet, et en attendant le lundi suivant pour la glorieuse version papier, il ne restait plus qu'à faire monter la sauce. Et là, Grégoire Corthay sait s'y prendre. Certes, c'est un journaliste professionnel et confirmé, mais il est aussi un homme de son temps, qui sait dégainer son Tweeter comme personne. Voici donc le message qu'il envoie à ses milliers de followers, à peine une heure après avoir mis son chef-d'oeuvre en ligne:

Comme Vigousse n'est disponible que le vendredi matin, que le chapeau de l'article en ligne indique que "la communauté juive est outrée" (ainsi que le tweet subséquent), que le responsable de la CICAD précise dans l'article qu'il a pris connaissance de l'infâme et bizarre fiche bricolage "vendredi matin" (étant lui-même abonné), et que, malgré son professionnalisme, Grégoire Corthay a quand même dû travailler au moins une heure pour son article, la seule conclusion possible est que toute la "communauté juive" est abonnée à Vigousse et le lit avidement dès sa réception. Sans quoi on voit mal comment elle pourrait être "outrée" et "choquée" avant que Grégoire Corthay ne produise son article. Bon, alternativement, il se pourrait qu'une seule personne à la CICAD prétende représenter l'ensemble de "la communauté juive", mais je pense que cette hypothèse n'est pas très sérieuse car elle ne ferait qu'alimenter les stéréotypes sur l'existence d'un "lobby" juif, et assurément ce serait complètement stupide, cynique et contre-productif de la part de la CICAD de faire une chose pareille. Une troisième possibilité, encore plus absurde, serait que Grégoire Corthay lui-même ait choisit de décider à la place de la "communauté juive" ce qui devrait la choquer ou pas. Mais ce serait là évidemment une vision parfaitement réductrice, caricaturale et limite stéréotypée de ce qu'est "la communauté juive", ce qui évidemment est complètement étranger à un journaliste professionnel et confirmé comme Grégoire Corthay, qui en plus n'a pas pour habitude de prendre ses lecteurs pour des imbéciles. Dès lors, il faut vraiment croire que "la communauté juive", d'une manière ou d'une autre a, dans son ensemble, et immédiatement après avoir pris connaissance de Vigousse le vendredi matin, unanimement été "choquée" et "outrée" par la fiche bricolage incriminée, et qu'elle en a dès lors informé la CICAD. Grégoire Corthay, de son côté, a eu vent du fait qu'effectivement, "la communauté juive" était outrée par une fiche bricolage, et il a décidé d'en faire un article. Ce scénario, dans le fond, est le plus plausible, car à quoi bon faire un article sur une simple fiche bricolage si elle n'avait pas outré une communauté entière? Cela n'aurait aucun sens... à moins d'imaginer que Grégoire Corthay n'est pas un bon journaliste et qu'il est en fait motivé par de mauvaises intentions; que le 20 Minutes ne soit qu'un torchon ignoble qui n'hésite pas à balancer des coups bas à la concurrence et prend en fait ses lecteurs pour des imbéciles; que la CICAD soit une association bidon guidée par l'incompétence, la mauvaise foi et l'opportunisme; et finalement que toute cette histoire ne soit qu'une minable supercherie, le résultat du mélange délétère de l'ignorance, la médiocrité, la stupidité et l'arrogance. Comme la confluence de tous ces facteurs, il me semble, est rigoureusement inenvisageable, l'hypothèse d'un outrage sincère de "la communauté juive" doit être retenue. Du coup, c'est mathématique, il faut bien accepter qu'il existe des sentiments antisémites dans la rédaction de Vigousse. En fait, cette possibilité est entièrement corroborée par Grégoire Corthay lui-même, qui fournissait cette précision importante sur la page Facebook de l'auteur de la fameuse fiche bricolage:

Vous voyez bien que ni Grégoire Corthay ni la CICAD n'ont monté un scandale de toute pièce, et que Vigousse est bien coupable d'antisémitisme, puisque, de fait, il faut que son rédacteur en chef "trouve une autre ligne de défense". S'il lui faut à tout prix trouver une "ligne de défense" qui soit convaincante, hé, c'est bien qu'il est coupable, non? LOL.

Très bien. Tout ceci étant établi, 20 Minutes pouvait se permettre de passer à la vitesse supérieure dans sa version papier, parue le 17 janvier 2011. Des milliers de pendulaires semi-conscients ont alors pu lire ce merveilleux titre: ""Vigousse" flirte avec l'antisémitisme". Autant dire, bien entendu, "Vigousse produit des messages antisémites dissimulés dans des fiches bricolages en apparence absurdes et anodines". Bien sûr, comme ça, à l'état brut, l'accusation de 20 Minutes semble assez dure et complètement disproportionnée. Mais d'un autre côté, on se doute bien qu'un journal aussi sérieux que 20 Minutes, dont on sait qu'il est réalisé par des journalistes professionnels et confirmés (qui en outre ne prennent pas leurs lecteurs pour des imbéciles), ne pourrait jamais balancer des accusations d'antisémitisme contre une fiche bricolage sans être absolument certain de ne pas sombrer dans le délire, l'abjection ou même dans la calomnie pure et simple. Le contraire serait tout simplement stupéfiant, d'autant plus que Grégoire Corthay et les responsables d'édition du 20 Minutes savent évidemment que ce genre de propos est absorbé dans l'inconscient des lecteurs peu attentifs, qui ne vont pas forcément approfondir leurs connaissances sur internet, et donc ils savent aussi que répandre l'idée que Vigousse puisse être antisémite pourrait évidemment nuire à la réputation du journal satirique et, du coup, à celle de ceux qui le font. Un comportement pareil, naturellement, serait parfaitement irresponsable, surtout dans l'hypothèse où l'affaire de la fiche bricolage antisémite ne serait qu'une grosse connerie montée en épingle par une bande d'abrutis sans la moindre déontologie. D'ailleurs, Grégoire Corthay ne peut décemment pas être soupçonné de pareille ignominie. Après tout, lorsqu'il travaillait au Matin Bleu (déjà), il a eu maintes occasions de démontrer son sens de l'éthique. Notamment, jamais il n'aurait vanté les mérites de son journal contre ceux de son concurrent, avant de changer de camp lamentablement sitôt les circonstances s'étant inversées. Jamais, en outre, il n'aurait balancé au hasard le nom de personnes qui auraient pu acheter ou non le chapeau de Dieudonné sur eBay. Jamais, au grand jamais, du reste, il n'aurait conduit une interview complaisante d'un aussi sinistre individu, et qui plus est jamais il ne se serait régalé de le faire passer pour une pauvre victime du racisme. Jamais non plus il n'aurait laissé entendre, au passage, qu'un continent entier puisse se réduire à des stéréotypes éculés et ignobles (par exemple en titrant sans guillemets que les africains sont des flemmards). Jamais, mais là on nagerait dans le grand délire, il ne se serait lui-même prêté à des allusions bassement antisémites qui auraient éveillé l'attention de la CICAD. Si c'était le cas, d'ailleurs, celle-ci n'aurait évidemment pas manqué de signaler un comportement aussi répréhensible dans, par exemple, son rapport pour l'année 2009 (mettons, au hasard, à la page 56).
Non, vous voyez bien, tout cela prouve, une fois de plus, que Grégoire Corthay est absolument blanc comme neige et rigoureusement intouchable sur le plan de la déontologie. La seule conclusion possible, dès lors, c'est que Vigousse a bel et bien "choqué" et "outré" la "communauté juive" avec une ignoble fiche bricolage, et donc que le journal satirique a effectivement "flirté" avec l'antisémitisme. On peut donc s'attendre à l'habituelle défense des "humoristes", qui se cachent toujours derrière "le second degré", "l'ironie" ou "l'absurde" pour défendre leurs intentions nauséabondes. Heureusement, on sait d'ors et déjà, suite à l'enquête approfondie de Grégoire Corthay, que cela ne prendra pas. Après tout, les gens ne sont pas des imbéciles, et ils savent bien faire la part des choses entre l'ironie et l'ignominie.